En
1960,
Brassaï publie le livre Graffiti, fruit de trente ans de recherches, régulièrement réédité, qui propose le graffiti comme une forme d'
Art brut, primitif, éphémère.
Picasso y participe. C'est sans doute la première fois que l'on évoque le graffiti comme un art.
Dans la foulée de
mai 1968, les messages politiques de la rue parisienne gagnent en poésie et en qualité graphique. Ils sont notamment le fait d'étudiants en philosophie, en littérature, en sciences politiques ou en art et font souvent preuve d'humour absurde ou d'un sens de la formule plutôt étudié : « Cache-toi, objet ! », « Une révolution qui demande que l'on se sacrifie pour elle est une révolution à la papa. », « Le bonheur est une idée neuve. », « La poésie est dans la rue », « La vie est ailleurs », « Désobéir d'abord : alors écris sur les murs (Loi du 10 mai 1968.) », « J'aime pas écrire sur les murs. », etc.
[14]. Ces slogans sont indifféremment écrits au pinceau, au rouleau, à la bombe de peinture (plus rare) ou sur des affiches sérigraphiées. C'est de cet affichage sauvage et militant que naît une tradition parisienne du graffiti à vocation esthétique. À la fin des
années 1970, l'artiste
Ernest Pignon-Ernest produira des affiches sérigraphiées, sans slogans, qu'il exposera dans plusieurs grandes villes : « les expulsés », collés sur les murs de maisons en démolition et représentant à taille réelle des personnes tenant des valises ou un matelas, « Rimbaud », représentant le poète, jeune, toujours à taille réelle. Les sérigraphies urbaines d'Ernest Pignon-Ernest interpellent le passant et lui demandent quelle est la place de l'homme ou de la poésie dans la cité moderne.Quelques années plus tard, les premiers «
pochoiristes » comme
Blek le rat continueront sur le même principe, cependant leurs œuvres ne sont plus des affiches collées mais des peintures exécutées selon la technique du pochoir. Dès 1982, pour annoncer leur « premier supermarché de l'art », Roma Napoli et JJ Dow Jones du Groupe Dix10 placardent dans le quartier Beaubourg de grandes affiches aux personnages de Comic's; vingt ans plus tard, toujours actifs, on les retrouve dans le mouvement Une nuit. Outre les pochoiristes, de nombreux artistes s'intéressent à l'art urbain et clandestin, comme
Gerard Zlotykamien, qui peint des silhouettes évoquant les ombres macabres restées sur les murs d'
Hiroshima;
Jérôme Mesnager, auteur d'hommes peints en blanc qui courent sur les quais de la Seine, etc. C'est aussi l'époque de la
Figuration Libre, une époque de créativité joyeuse et humoristique, née du
Pop-Art, de
Bazooka, du
vidéo clip, du graffiti, souvent présente dans la rue, avec
Robert Combas, Les
Frères Ripoulin (qui peignaient sur des affiches posées clandestinement),
Daniel Baugeste et Claude Costa (qui se faisaient enfermer la nuit dans le métro pour pouvoir en détourner les affiches),
Hervé Di Rosa,
Speedy Graffito,
Paëlla Chimicos,
VLP (Vive La Peinture), etc.Outre la rue, les
catacombes de Paris seront aussi à l'époque un lieu important du graffiti.
Le graffiti « new-yorkais » apparaît en France dès
1982-
1983, avec des artistes comme
Bando, Blitz, Lokiss, Scipion, Skki ou encore Saho. Les premiers articles de presse consacrés à ce phénomène ne datent pourtant que de
1986[15]. Vers
1986-
87, le graffiti « new-yorkais » et sa culture hip-hop prennent définitivement le pas à Paris sur les formes plus proches du monde de l'
art contemporain, lequel retourne, sauf exception, à ses
galeries.À Paris, le graffiti new-yorkais se trouve des lieux privilégiés comme les quais de la Seine, les palissades du
Louvre ou du
centre Georges-Pompidou, le terrain vague de
Stalingrad/
La Chapelle, puis s'étend progressivement aux cités des
banlieues où la culture hip-hop trouve son second souffle en devenant plus populaire et moins bourgeoise. Paris attire de nombreux graffiteurs européens (Shoe, Mode 2) mais aussi américains (Jonone, Futura 2000, T-Kid,
A-One).